“First time I met the blues” par Little Brother Montgomery

"First time I met the blues" par Little Brother Montgomery Paroles de blues

Attention : certaines paroles de blues et leur traduction peuvent ne pas être adaptées à un travail avec le jeune public.
Extrait de Blues Magazine n°66


Enregistré à Chicago chez Chess en mars 1960, ce morceau interprété par Buddy Guy symbolise à lui seul le Chicago Blues. Il a été écrit et composé par Eureal Little Brother Montgomery qui joue du piano sur l’enregistrement. Dans cette version qui reste son premier succès, Buddy Guy joue avec sa voix : il théâtralise et interprète le texte avec la conviction et l’implication des plus grands. On a l’impression d’un supplique à la mode gospel. Plus tard, quand il la réenregistrera, tout en gardant cette façon de vivre le texte, il laissera une plus grande place aux solos de guitare.


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Le premier élément à noter sur ce texte, c’est que le narrateur s’adresse directement au Blues comme à une personne en prenant son public à témoin. C’est un procédé utilisé par d’autres avant lui, par exemple Leadbelly dans Good Morning Blues. Pourquoi parler directement au Blues alors que si l’on s’en tient au sens premier, on le traduit par un nom commun : le cafard ? On peut y trouver deux fonctions : s’adresser à son for intérieur pour combattre ses démons, ses mauvaises habitudes, ses errements intérieurs, ses mauvais diables ou, alors, donner une identité au Blues qui ne prendrait sens que pour certains. Ce fameux double sens que les bluesmen utilisent pour parler de sexe sans craindre la censure.

Quand on observe les trois couplets qui composent ce texte, on constate que les paroles restent simples sans ambiguïté, compréhensibles par tous sans connivence argotique. Un premier couplet qui raconte la première rencontre avec le Blues, fortuitement dans la forêt sans s’y attendre, mais avec tout de même une maison qui brûle (accident, incendie volontaire ?). Un second couplet qui constate que malgré la fuite permanente, le risque de perdre la vie est toujours là. Et enfin, un dernier couplet plus fataliste, où le narrateur n’a pas d’autre choix que de vivre avec cette menace au-dessus de sa tête.

Et si tout simplement Blues signifiait le blanc, le raciste. Le texte, sa forme, l’interprétation si démonstrative, le public qui vit la même chose pris à témoin, tout prend sens. Le narrateur s’adresse au blanc qui a brûlé sa maison, qui le poursuit dans la forêt, d’arbre en arbre (une référence au lynchage). Il supplie le blanc de lui laisser la vie sauve. Et pour terminer, il s’étonne de sa présence permanente mais décide de s’en accommoder. Pour combien de temps ? Nous sommes en 1960, les temps changent, une certaine Rosa Parks a déjà refusé de se lever d’un bus pour laisser sa place à un blanc, un jeune pasteur Martin Luther King fait parler de lui… la fin de la ségrégation est en route.

Texte : Patrice Gandois / Blues Magazine. Publié avec l’aimable autorisation de Blues Magazine. Tous droits réservés.