1945 – 1960 : la diversification du blues et la naissance du rhythm’n’blues
Itinéraires chronologiquesLa seconde guerre mondiale a renforcé le traditionnel courant migratoire des noirs du Sud vers les grandes villes du Nord et vers la Californie (courant qui s’était ralenti après la Grande Crise). L’économie de guerre a généré de nombreux emplois industriels et a donc incité la population noire à quitter la campagne du Sud pour venir s’installer dans les grandes villes industrielles principalement au Nord et en Californie. Ces migrations rapides et massives ont entraîné la formation dans les grandes villes de quartiers noirs : Chicago et Détroit au Nord, Oakland et Los Angeles en Californie.
A Chicago et à Détroit, là où les quartiers noirs vont devenir de véritables ghettos sous l’effet de l’insalubrité et l’insécurité croissante, le blues va se faire plus dur que celui du Delta pour exprimer les sentiments d’une communauté toujours rejetée par la société américaine mais dont les valeurs de solidarité se délitent au sein du ghetto. L’amplification électrique permettra aux grands bluesmen de Chicago et Détroit (Muddy Waters, John Lee Hooker, Otis Rush) d’exprimer à merveille ces nouveaux sentiments communautaires.
En Californie, le blues va se faire moins dur, plus sophistiqué et plus travaillé, à l’image des conditions de vie des Noirs venus du Texas et d’Oklahoma. Les quartiers noirs de Los Angeles et d’Oakland après 1945 seront à l’image de la Californie de cette époque, pacifistes et accueillants, c’est à dire bien éloignés de l’image d’une “jungle de béton” que renvoyaient les quartiers noirs de Chicago et Détroit. On a parlé pour la Californie du blues de l’intégration sociale, ou encore de la réussite financière. Ce blues provenait de personnes éduquées sachant lire et écrire la musique (T Bone Walker, Charles Brown étaient diplômés d’université).
Dans le Sud rural, berceau du blues, où les conditions de vie n’ont pas été celles du Nord ou de la Californie après-guerre, le blues est resté en partie rural, mais a beaucoup évolué et s’est diversifié sous l’effet de l’électrification, qui a offert de nouvelles possibilités sonores à tous les instruments et en particulier la guitare et l’harmonica auxquels l’électricité a apporté une popularité grandissante.
Le Blues s’est donc énormément diversifié après-guerre sous l’effet des nouvelles conditions de vie urbaine des noirs-américains et de l’électrification des instruments. Parmi toutes ces évolutions, une nouvelle forme de blues qui a marqué toute l’évolution musicale de la seconde moitié du XXème siècle est née à la Nouvelle-Orléans : le Rhythm’n Blues.
Musique débridée pleine d’entrain et de joie de vivre, le rhythm’n’blues est né du foisonnement musical de cette ville bigarrée au plan culturel (français, espagnols, anglais, africains) et de la diversification du blues d’après-guerre. C’est cette musique endiablée qui a donné naissance dans les années 50 au Rock’n Roll. Les jeunes Blancs du Sud ont en effet été attirés par cette musique noire dont ils se sont inspirés pour faire évoluer leur Country music. Le “Rock” et le “Roll”, dans le langage négro-américain, signifiaient des changements de positions tant musicales que sexuelles. On a d’abord appelé cette musique le Rockabilly, Billy venant de Hill Billy surnom dont étaient affublés les sudistes par les yankees ( “péquenots” ), puis Rock’n Roll, marquant ainsi la filiation musicale prépondérante au Rhythm’n Blues des Noirs.
Texte : Blues sur Seine. Tous droits réservés
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