BB King sur RFI
Dossier biographiqueExtrait du site www.rfi.fr
Le roi du Blues n’est plus… B.B. King nous a quittés le 14 mai 2015. Son histoire palpitante entre maintenant dans la légende, et son répertoire nourrit désormais l’inspiration de ses nombreux admirateurs. Né le 16 septembre 1925, non loin d’Indianola dans le Mississippi, c’est à l’église que le jeune King Riley fait ses premiers pas dans «L’épopée des Musiques Noires». Il découvre les airs de Negro-Spirituals sous l’œil bienveillant de maman qui le met en garde contre les paroles profanes et diaboliques des chanteurs de Blues, mais comme tous les gamins du monde, le petit Riley n’a qu’une idée en tête : braver l’interdit.
En 1935, la mort de sa mère va précipiter les évènements. Désormais orphelin, il est un temps livré à lui-même, et découvre seul son environnement social et culturel. Noir, pauvre, abandonné dans le sud profond d’une Amérique raciste, il comprend très vite que son avenir est compromis s’il reste à Ita Benna, le petit village qui l’a vu naître. C’est le début d’un long voyage sur les routes du Blues. 10 ans plus tard, le timide Riley est devenu un jeune homme ambitieux qui écoute ses contemporains, et se laisse séduire par les lumières de la ville, en l’occurrence Memphis, Tennessee. Nous sommes alors en 1947, à l’aube d’une prestigieuse carrière qu’il n’envisage même pas. C’est pourtant là, à Memphis, que la chance lui sourit.
A l’invitation de l’harmoniciste Sonny Boy Williamson, il assiste et bientôt participe à plusieurs émissions de la radio KWEM. Cette première expérience sur les ondes l’amuse à tel point qu’il se met en tête de décrocher un contrat d’animateur radio. Il va donc démarcher plusieurs stations de la région jusqu’à obtenir un rendez-vous avec les patrons de WDIA, deux hommes d’affaires blancs qui tentent, tant bien que mal, de remonter l’audience de leur radio moribonde. En voyant arriver un jeune guitariste noir dans leurs locaux, ils ont une idée lumineuse : orienter leur programmation musicale vers le public afro-américain. Ils invitent leur recrue à passer une audition en direct, et lui confie la tâche de chanter les publicités, accompagné de sa guitare. Le résultat est au-delà des espérances. Les courtes prestations du jeune musicien font mouche. Le Blues Boy de Memphis a trouvé ses initiales : B.B. King devient la vedette de la radio locale et assoie sa réputation.
Fort de ce succès radiophonique, il parvient enfin à enregistrer ses premières compositions. Il devient progressivement un bluesman et un animateur de radio reconnu et respecté. Tout au long des années 50, B.B. King va sillonner les Etats-Unis et étendre sa renommée à travers ses nombreuses prestations dans les clubs de blues. Une décennie pleine d’espoir avant les heures de remise en question. B.B. King prend conscience, au début des années 60, des limites de son statut de bluesman. Il veut aller plus loin, mais la société ségrégationniste d’alors n’accorde que peu d’intérêt à un musicien noir, et ruine ses élans créatifs. B.B. King piétine, se cherche, tourne en rond et s’impatiente.
Pendant ce temps, Outre-Atlantique, une flopée de musiciens britanniques révise les classiques et découvre le patrimoine imposant légué par les grands frères d’Amérique. John Mayall, Eric Clapton, les Rolling Stones vont réhabiliter le blues de leurs aînés et ouvrir les oreilles d’un public blanc hippie et curieux. Les vétérans, John Lee Hooker, Muddy Waters, Willie Dixon sont célébrés par une nouvelle génération qui ignore les barrières raciales et salue les pionniers du blues comme de vieux et courageux parents ayant résisté à l’oppression. B.B. King n’échappe pas à la règle et accueille avec bonheur tous ces jeunes qui, soudainement, lui ouvrent les portes de la gloire. Devant cette foule bigarrée, il raconte son histoire, façonne son image de bluesman valeureux et présente sa guitare « Lucille ».
B.B. King comprend très vite l’intérêt de choyer ce nouveau public qui lui permet d’entretenir la flamme et de rebondir. Il dessine déjà, à cette époque, les contours de son personnage. Foncièrement généreux, attentif et disponible, il devient ce musicien humble et attachant à qui l’on s’adresse avec révérence pour évoquer les amis, les rencontres, l’histoire du blues…
Conscient de son aura grandissante, il veillera à peaufiner cette image de référent. Ainsi, tout au long de sa lumineuse aventure musicale, rien ne fut laissé au hasard. Chaque apparition publique devait célébrer le «Roi du Blues». De Chicago à Kinshasa, de Paris à Sidney, B.B. King fut acclamé tel un sympathique monarque de la culture noire… A l’écoute de ses contemporains, il acceptait volontiers de converser avec de jeunes artistes en devenir ou de tenter des croisements inattendus comme, en 1997, en compagnie du rappeur Heavy D.
A l’issue de notre dernière rencontre, B.B. King avait accepté de se retourner sur son passé et d’analyser son long cheminement vers le firmament du blues…
“Là où j’ai grandi, la guitare était le seul instrument que l’on pouvait s’offrir. Les pianos étaient bien trop chers. De plus, il n’y avait pas de magasins dans la région, on ne pouvait pas s’acheter de saxophone ou de batterie très facilement. La guitare était le seul instrument disponible. Quand j’ai réalisé que j’avais véritablement envie de vivre de ma passion, j’avais 18 ans. Là, je me suis dit : ‘Peut-être un jour, serai-je connu comme chanteur de gospel ?’ A l’époque, je ne m’imaginais pas chanteur de blues. Je voulais seulement voyager, me faire un nom et la musique pouvait peut-être devenir l’échappatoire. De surcroît, les gens semblaient apprécier mes qualités de bluesman, parfois, ils me donnaient une petite pièce, c’est ce qui m’a persuadé de continuer”.